Clara Clara

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<< Il retourna au parc de Choisy, qui l'accueillit une nouvelle fois avec cette même indifférence tranquille où s'installer sans plus rien attendre, délesté de tout désir, libre de tout espoir, rendu au pur présent. Clara-Clara, traîtreusement fidèle, était bien là, jamais dérobée à ses regards, ouverte à tous. Il y pénétra par habitude, sans y penser, ni lassitude. Il épousa son mouvement, en suivit la courbure, se glissa dans l'intimité de son corps, protégé du bruit du monde, caressant dans la demi-conscience d'une nuit sans sommeil l'intérieur de ses formes, comme un sexe offert, exposé à la douceur, au délit, à l'offense. Passant et repassant du dedans au dehors dans un mouvement sans but, sans pouvoir se détacher d'elle qui ancrait encore sa vie quelque part. >>

 

Du 13e arrondissement de Paris à New York, le récit voyage entre le présent de la mémoire et une réalité incertaine, un homme et une femme, parmi des oeuvres, jusqu'au démantèlement de Clara-Clara et aux facéties d'un petit singe sur la pellicule tremblée du souvenir. Hommage au sculpteur Richard Serra, au violoncelliste Pablo Casals, aux visages sans nom des passants, migrants, exilés, gitanes, qui sont aussi notre histoire.

 
 
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Muriel David travaille les mots et l'image, écriture et films indépendants se relayant pour donner différemment forme au langage. Après des années consacrées au cinéma expérimental, en tant que cinéphile et fabricante d'images, elle s'est tournée vers le roman avec Clara Clara.
Ses films en chantier sont Sept haikus ou poèmes visuels (Loubignac), Ma il blù di Giotto, chi se lo ricorderà?, d'après le Cantique des Créatures de Saint François d'Assise, détournement politique de cet hymne aux éléments, réalisé avec André Coasguen, clochard, et Antonino Polizzi, chef d'orchestre (Paris, Venise), Hypophragma (Paris, Montagne de Reims) et Lumières, une phénoménologie de la perception (Tourrettes-sur-Loup).
Clara Clara doit son nom à la sculpture de Richard Serra, deux ellipses d'acier contraires formant un tout indivisible, centre de gravité du roman, qui s'achève avec son enlèvement.
Muriel David réalise actuellement des livres d'artiste avec la sculptrice et peintre Eva Wellesz (Cendres vives, Il vento).

 
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Rajak Ohanian est né à Décines, près de Lyon, d'une famille arménienne originaire d'Asie Mineure. À partir de 1954, il fait des photographies de théâtre, pour Roger Planchon, puis pour Patrice Chéreau, Marcel Maréchal... Parallèlement, il réalise Les Fils du vent (1958-1967), travail sur les Gitans et leur rassemblement aux Saintes-Maries-de-la-Mer, entre à l'agence Rapho et poursuit ses projets personnels, dont des portraits de jazzmen (Monk, Don Cherry...), de peintres, sculpteurs (dont Richard Serra), d'auteurs (Bachelard, Genet, Gatti...) et de réalisateurs (Welles, Straub...). Suivront New York (1973), Algérie (1977), son installation à Sainte Colombe-en-Auxois (1979-1981), dont il tire Portraits d'un village, puis Chicago (1987-1989) et Métamorphoses I (1991-1993) en Bretagne.
L'hiver 2005-2006, Alep, 1915... pour retrouver les traces de l'enfance de son père, placé dans un orphelinat après le génocide arménien.
L'oeuvre de Rajak Ohanian a été exposée de nombreuses fois, notamment au Musée Niepce à Châlons-sur-Saône, à l'Institut d'Art Contemporain de Villeurbanne, à la Biennale d'Art Contemporain de Montréal, et à la Cité Nationale de l'Histoire de l'Immigration à Paris...

 

Et cette brousse sanglante et vénéneuse apprenait l’intelligence à mesure du pas, à hypnotiser par la douceur les ombres hallucinées. Le silence du désert lui-même pouvait s’écouter, elle le sondait, inquiète, l’oreille tendue vers ses râles, immanquablement repoussée par la dignité de la défaite, éconduite par la retenue fière, la pudeur jalouse, étrangère, fermement maintenue à la frontière par les épaules, femme à peine distinguée des autres pour seulement s’assurer de la débâcle, pour en finir avec l’espoir.

Mais elle pressentait que ce n’était pas le silence qui précède et accompagne le chant des morts, son écho une fois tu qui s’élevait du désert, qu’il n’était pas temps encore pour la plainte du Kaddish. Le bruit du silence s’enchevêtrait encore avec les mots, pouvait accéder au langage, composait une musique qui n’était pas celle, seule ou pas encore, de la reddition.

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